"Les jouets vivants" Jean-Yves Cendrey

Dans une virtuose et rageuse Lettre au père, Jean-Yves Cendrey raconte comment son père l'a frappé, humilié et terrorisé, jusqu'à ce qu'il l'empoigne à son tour. Une scène originelle qui jette une lumière crue sur le jour où il a conduit un instituteur, pédophile avéré, à la gendarmerie de X.

Des dizaines d'enfants violés, des vies coulées dans l'oubli par ceux qui auraient pu intervenir. Comment raconter l'"Affaire" de X sans verser dans le récit de circonstance ? Jean-Yves Cendrey décide de s'offrir un prête-nom. C'est à Raoul Rose qu'il confie la chronique du "village de la honte", un paysage humain sombre et burlesque d'où émerge peu à peu le drame.

La dimension autobiographique confère à ce livre une place résolument à part dans l'œuvre romanesque de Jean-Yves Cendrey. Les jouets vivants reste pour autant fidèle à l'auteur, fidèle à cette colère qu'il n'a jamais lâchée.

Jean-Yves Cendrey, né en 1957, a été un enfant malheureux, martyrisé par son père, homme violent qui faisait revivre l'Indochine à la maison. C'est un adolescent écorché vif qui sera sauvé par la rencontre d'une étudiante qui deviendra sa femme, Marie Ndiaye, futur prix Goncourt. Après avoir répondu à son père pour toutes les agressions qu'il a subies, il viendra s'installer en Normandie où il sera témoin d'une histoire de pédophilie qui aura concerné plusieurs dizaines d'enfants de 6 et 7 ans. Il ne supportera pas de laisser en liberté l'instituteur responsable et le conduira à la gendarmerie où il sera pris en charge par un policier ivre.

Le roman ne trouve pas sa richesse dans l'affaire en elle-même qui malheureusement reste banale, et que l'auteur ne développera pas plus que nécessaire mais dans le drame vécu par les enfants, la façon qu'ils auront d'en sortir, ou non et la révolte que lui inspire des attitudes aussi irresponsables que les représentants de l'État ou les parents d'élèves abusés. Il dénommera X "le village de la honte" où primera la loi du silence avant tout et le quittera pour aller vivre à plusieurs centaines de kilomètres de là. J'ai du mal à comprendre comment les parents d'élèves pouvaient continuer à se taire, tout en étant au fait des actes immondes pratiqués sur de petits enfants ! C'est purement révoltant.  5/10 ★ ★